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Photo du rédacteurSolène

"Le linguiste était presque parfait" : arnaque, crime et linguistique

Bonjour les chatons ! Après avoir parlé la dernière fois du Crime de l’Orient-Express d’Agatha Christie, restons dans le monde du polar et penchons-nous aujourd’hui sur un roman de David Carkeet : Le linguiste était presque parfait.

Il y a quelques années, j’ai fait un peu d’études de Sciences du Langage à la fac ; autrement dit de la linguistique. Quand j’ai découvert ce livre, j’ai donc été très intriguée par son titre et sa quatrième de couverture et j’avais hâte de le lire pour voir de quoi il retournait.


Et j’avoue que ce fut une bonne surprise !


À l’institut Wabash – qui fait aussi office de crèche bon marché , Jeremy Cook étudie les babillages des nourrissons. Quand son collègue Stiph est retrouvé raide mort, les autres linguistes n’ont qu’à bien se tenir, Jeremy s’improvise détective. Qui de Mike, le séducteur, Woeps, le discret, Aaskhugh, la commère, Orffmann, le mal-aimé, ou encore Wach, le chef despote, a bien pu faire le coup ?


 

Dès les premières pages, j’ai tout de suite retrouvé le même genre d’humour un peu désinvolte et grinçant que j’avais tant apprécié dans Une folie passagère de Nicolas Robin. Et si l'on ajoute à cela un humour de linguiste, il n’en fallait pas plus pour que je sois conquise !

De même que dans le roman de Nicolas Robin nous suivions les aventures de Bérangère à travers ses yeux et qu’elle se révélait ainsi assez comique malgré elle, dans Le linguiste était presque parfait, le récit est également raconté à la première personne du singulier selon le point de vue de Jeremy, qui se montre tout aussi drôle avec ses réflexions intérieures sur ses collègues, son patron, la linguistique, sa vie en général, etc.


Vous l’aurez compris, Jeremy est notre protagoniste, et bien qu’il soit loin d’être le meilleur des types bien, je me suis investie en lui ; sa manière maladroite de mener sa propre enquête et les quelques tuiles qui lui arrivent le rendent attachant.

De même, les autres personnages sont tous très bien caractérisés, chacun ayant une personnalité et une manière de parler propre à lui. Ce florilège de caractères bien démarqués mène souvent à des situations et des échanges hilarants et jouissifs.


Concernant l’intrigue criminelle, il y a très peu d’éléments (voire aucun selon moi) qui permettent de deviner l’identité du meurtrier, et du coup sa révélation arrive un peu de but en blanc. Malgré cela, le livre est agréable à lire, j’ai eu l’impression que l’enquête passait justement un peu à la trappe par moments, entre les ‘dramas’ de l’institut, les travaux de Jeremy et ses « névroses », mais ça n’a pas été dérangeant du tout car les intrigues secondaires sont tout aussi intéressantes et plaisantes à suivre.


 

Attention, le passage qui va suivre dévoile en partie la fin de ce roman ainsi que celle du Meurtre de Roger Ackroyd d’Agatha Christie. Si vous n’avez pas déjà lu ces deux livres , vous pouvez passer tranquillement au paragraphe d'après.


Pour rebondir sur le dénouement du roman, je disais précédemment que je ne l’avais pas vu arriver, et que j’étais bien loin de me douter de l’identité du meurtrier. Je m’attendais presque à un retournement de situation comme dans Le Meurtre de Roger Ackroyd d’Agatha Christie, où Jeremy aurait été lui-même le meurtrier. En effet, David Carkeet le rend un peu soupçonneux par moments ; par conséquent, jusqu’à la toute fin, je n’étais pas sûre de son innocence et je n’aurais pas été surprise si ça avait été lui l’assassin.


 

Comme on parle de linguistique ici, donc de travail en lien avec la langue, je ne peux pas m’empêcher de faire un parallèle avec la traduction. J’ai constaté qu’il y avait beaucoup d’éléments où conserver la même valeur humoristique de l’anglais vers le français, le même intérêt pour l’histoire, était très difficile (par exemple des jeux de mots, des anecdotes sur la langue anglaise, sur des noms propres anglophones, etc.). De fait, j’imagine que certaines choses fonctionnement moins bien que la version originale, mais je salue Nicolas Richard et son travail de traduction, et aussi pour avoir sauvé les meubles dans des moments où la tâche était compliquée (par exemple, vers la fin, le jeu de mot avec ‘cook’ est très drôle et fonctionne à 100 % en anglais ; l’option ‘coq’ choisie pour la version française perd beaucoup du charme de la blague originale mais elle rattrape bien la situation tout de même !).


Pour conclure, je dirais que j’ai pris beaucoup de plaisir à lire ce livre. Comme j’ai étudié un peu la linguistique à la fac et que je m’y intéresse toujours de mon côté, les réflexions et les traits d’humour de linguiste ont totalement marché avec moi, mais je suis consciente que certain(e)s puissent y être complètement hermétiques s’ils n’ont pas entendu parler de certaines choses en lien avec cette discipline.

Dans tous les cas, c’était une belle découverte, j’ai beaucoup aimé le style et le ton du roman, et j’ai hâte de lire d’autres romans du même auteur !


 

"Il va falloir que ça attende, Jeremy. Nous devons tous faire des sacrifices. C'est comme ça et pas autrement. Il y a des tas de choses que j'aurais envie d'entreprendre moi aussi, plutôt que ce que je suis obligé de faire... Je m'efforce d'accomplir mon devoir et j'aurais souhaité que vous vissiez les choses sous le même jour..." Cook eut comme une envie de pleurnicher. Pourquoi Wach utilisait-il de telles formules ? Usait-il de ce style châtié au lit avec sa femme ? D'ailleurs, se mettait-il au lit ? Si oui, s'adressait-il aux draps, leur ordonnait-il au subjonctif de demeurer impeccables toute la nuit ?


 

Sur ce, je vous laisse sur ma citation préférée du roman, et je vous dis à très vite pour de nouvelles aventures littéraires !



Solène


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